LE CONTEXTE
Les rizières constituent des milieux très favorables au développement d’une flore diversifiée.
Le Guide pratique «
Plantes des rizières de Camargue » co-édité avec le CIRAD et le Parc Naturel Régional de Camargue recense et décrit 178 espèces poussant dans les milieux rizicoles de Camargue (incluant les rizières mais également les zones exondées proches des rizières).
Parmi celles-ci, une quarantaine d’espèces peuvent être considérées comme adventices de la culture, et certaines ont un impact majeur sur la culture :
♦ Les riz adventices, appelés localement « riz crodo » :
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Forme adventices appartenant à la même espèce (Oryza sativa) que le riz cultivé, ils ont été signalés en 1986, mais leur apparition en Camargue est bien antérieure. Au champ, ils peuvent se distinguée du riz cultivé par un ou plusieurs caractères (vigueur de levée, hauteur de palnte, capacité de tallage, précocité, format et aristation du grain, coloration des noeuds, pilosité, ...). Leur principale caractéristique est leur forte aptitude à l'égrenage ne leur permettant pas d'être récoltés, et leur conférant une capacité d'infestation rapide des parcelles. |
- ♦ Les Echinochloa, appelées localement « panisses » :
En Camargue, le terme de panisses regroupe l'ensemble des Echinochloa, parmi lesquelles Echinochloa crus-galli (qui constitue l'espèce principale) et E. Phyllopogon. Les panisses peuvent présenter une variabilité morphologique importante, et les riziculteurs distinguent souvent des écotypes blancs et rouges, en fonction de la couleur de la base des tiges, sur lesquels l'efficacité de certains herbicides diffère. |
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- ♦ Les Cypéracées, appelées localement « triangles » :
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Sous ce terme général sont regroupées plusieurs espèces caractéristiques des milieux inondés, parmis lesquelles les plus fréquentes sont Bolboschoenus maritimus ("triangle maritime"), espèce à reproduction essentiellement végétative, mais également Schoenoplectus mucronatus, et Cyperus difformis ("triangle de semis"), espèces annuelles. |
Enfin, parmi les autres espèces majeures, peuvent être citées :
- ♦ les Typha (T. latifolia et T. domingensis), les Heteranthera (H. reniformis et H. limosa), la Leersia (L.oryzoides), Alisma lanceolatum ainsi que plusieurs dicotyledones (Polygonum spp, Bidens frondosa, Ammania coccinea et Lindernia dubia).
Face à ces adventices, les producteurs sont tenus de mettre en œuvre un ensemble de pratiques spécifiques adaptées s’ils ne veulent pas remettre en cause la pérennité de leur système de culture.
Plusieurs facteurs contribuent à expliquer l’impact important de l’enherbement :
- ♦ la présence d’une nappe salée à très faible profondeur imposant une immersion quasi-permanente de la culture et limitant, voire interdisant la pratique de rotations culturales, ce qui rend plus difficile la gestion des espèces adventices,
- ♦ les températures souvent limitantes en début de cycle, responsables de levées lentes et hétérogènes ayant pour conséquence une concurrence accrue des espèces adventices colonisant plus rapidement la rizière,
Dans ces conditions, l’enherbement a souvent un impact très marqué sur les rendements, en riziculture biologique mais également en riziculture conventionnelle.
LES ACTIONS MISES EN OEUVRE
La réalisation d’enquêtes et de relevés floristiques visant à mieux identifier les espèces problématiques et l’évolution de leur présence ou de leur impact.
La dernière enquête a été menée en Camargue durant la campagne rizicole 2010. Elle a consisté en la réalisation de relevés floristiques sur 179 parcelles cultivées en riz, réparties dans 30 exploitations.
Ces relevés ont été effectués durant les mois de juillet et août, soit postérieurement aux interventions de désherbage.
Les principaux éléments ressortant de ce suivi, et de sa comparaison avec la précédente enquête réalisée en 2002 selon le même protocole, ont été les suivants :
- ♦ la proportion de rizières considérée comme très enherbées a été multipliée par 2,5 (13,5 % des rizières contre 5,4 % en 2002) sur les cultures en conduite conventionnelle,
- ♦ le niveau moyen d’enherbement atteignait 18,9 % (12,1 % en 2002) sur ces mêmes cultures.
Répartition des rizières en conduite conventionnelle selon leur niveau d’enherbement global
(comparaison 2002-2010)
Concernant les analyses par type d’adventice, les relevés 2010 ont mis en particulier en évidence une augmentation très nette de la fréquence d’observation (= proportion des rizières dans lesquelles l’adventice a été observée) de certaines d’entre elles, parmi lesquelles :
- ♦ Cyperus difformis (triangle de semis) : fréquence d’observation multipliée par 4,3
- ♦ Echinochloa phyllopogon : fréquence d’observation multipliée par 3,8
- ♦ Leersia oryzoïdes : fréquence d’observation multipliée par 2,7
- ♦ Heteranthera reniformis :fréquence d’observation multipliée par 2,7
- ♦ Riz crodo : fréquence d’observation multipliée par 1,7
Si l’augmentation observée pour le riz crodo était liée aux conditions de l’année (peu de faux-semis réalisés), l’évolution observée sur les autres espèces apparaissait plus préoccupante, compte tenu du peu d’alternatives disponibles pour les producteurs dans le choix de leurs programmes herbicides.

Fréquence d’observation des principales adventices : comparaison 2002-2010
(Fréquence = proportion des rizières dans lesquelles l’adventice a été observée)
Concernant le recouvrement local (= recouvrement moyen dans les parcelles dans lesquelles l’adventice est présente), on a observé également une forte évolution pour certaines espèces, parmi lesquelles :
- ♦ Leersia oryzoïdes : recouvrement local multiplié par 2,7
- ♦ Scirpus mucronatus (triangle de semis) : recouvrement local multiplié par 2,2
- ♦ Polygonum spp (renouées à feuilles larges) : recouvrement local multiplié par 2,1
- ♦ Riz crodo : recouvrement local multiplié par 2,1
Enfin, on a également noté l’arrivée d’une nouvelle graminée annuelle, Leptochloa fascicularis, non identifiée en 2002 et dont la présence en Camargue apparaît en croissance depuis 2009.
Recouvrement local des principales adventices : comparaison 2002-2010
(Recouvrement local = recouvrement moyen dans les parcelles dans lesquelles l’adventice est présente)
L’appui aux démarches d’Autorisations de mise sur le Marché
par la réalisation d’essais phytosanitaires
Le CFR possède un agrément BPE (Bonne Pratiques d’Expérimentation).
Cet agrément délivré par le Ministère de l’Agriculture est soumis à renouvellement régulier. Il permet au CFR de réaliser des essais officiellement reconnus, dont les résultats peuvent être utilisés dans les dossiers de demandes d’Autorisation de Mise sur le Marché constitués par les sociétés phytosanitaires.
Chaque année, le CFR intervient ainsi comme prestataire pour la réalisation de divers essais herbicides :
- ♦ essais d’efficacité
- ♦ essais de sélectivité
- ♦ essais de valeur pratique.
La réalisation d’essais de gestion intégrée de l’enherbement
Ces essais visent à évaluer l’impact de différents facteurs, tels que les choix variétaux, les interventions de pré-semis, les décalages de dates d’implantation sur le niveau d’enherbement des rizières.
Plusieurs essais ont été réalisés sur cette thématique depuis 2009.